« L’instant, sous le soleil, était une coulée de feuilles et de lumière. On ne la reverrait jamais. L’œil saisit aussi une mare ensommeillée, tout en reflets. Dans une de ses anses s’étirait quelque chose qui s’apparentait à une galaxie. Mourante, naissante, impossible de savoir. Tout était suspendu, même le frisson des eaux assoupies. Et cependant le pinceau du peintre les a captés et restitués jusqu’à leur vacillation. Un autre jour, c’est une canopée qui a arrêté l’œil d’Agosti. On ne saura jamais dans quelle forêt. Ni d’où venait la tache de soleil en fusion qui s’y était égarée. Avant lui, de toute façon, dans ce bois perdu (à moins que ce ne soit un taillis, un fourré), personne n’avait eu l’idée de lever les yeux vers la cime des arbres ; et depuis, selon toute vraisemblance, ça ne s’est plus jamais reproduit. Quelle importance. En voici la trace, les tableaux, l’œuvre… »
Irène Frain, extrait du texte Ce réel inaperçu pour la monographie.